Débris

Au centre une immense croix, lumineuse et disloquée. Celle sur laquelle le père s’auto-crucifie dans un acte désespéré. Ambiance. Ainsi commence mi-trash, mi-hilarant, ce Débris corrosif au possible du dramaturge anglais Dennis Kelly, qui verra par la suite une mère s’étouffer avec un os de poulet.

Sur le plateau ce sont les enfants qui parlent, Michelle et Michael. Orphelins abusés, sevrés d’amour. Que leur reste-t-il alors si ce n’est inventer, travestir la réalité, se laisser aller à des univers fantasmagoriques qui se jouent du cauchemar ?

On connait le talent de Julie Teuf – Peter Pan, Libre arbitre, Mine de rien –, artiste compagnonne du TnBA, pour embraser les textes et empoigner le jeu intensément. Cette langue de Dennis Kelly « c’est un gros bouillon, une promesse de jubilation pour les comédiens », prévient-elle. Et de fait les mots roulent abrupts, tranchants, triviaux. Accompagnée de sa bande de toujours, – Fred Egginton, fondateur du CaBaret GraBuge avec qui elle a commencé le théâtre à Amiens et Anthony Rzeznicki –, elle fait grincer aux encoignures cette pièce chargée d’humour noir, de douleur, mais surtout de grands délires inventifs. Débris ramasse les morceaux d’une histoire familiale brisée, certes, mais creuse la résilience plutôt que le trauma, révèle le beau derrière la crasse. Un théâtre de la purge, qui par des détours insolents, fait aussi éclater l’amour filial.